2 Familles sommables à termes positifs
2.1 Rappels
Rappel 1.6.
La somme avec , est définie à l’exception du cas où et .
Contrairement au cas des limites, on pose , pour .
Pour un ensemble non-vide (non-nécessairement borné), on utilise pour le plus petit majorant de et pour le plus grand minorant de .
On utilisera aussi , .
Si est une suite finie (disons de nombres complexes) et une bijection.
La propriété de commutativité de la somme donne:
Démonstration :
En voyant comme produit de transpositions, il suffit de montrer le résultat pour une transposition avec .
Mais par commutativité () et associativité () de la somme:
□
Corollaire 1.10.
Si est fini et une bijection, alors ne dépend pas de la bijection . On note
Démonstration :
Si on prend une autre bijection on considère la bijection de sorte que . La formule de commutativité de la somme conclut:
□
Le résultat suivant résume les propriétés de manipulation de ces sommes:
Proposition 1.11.
-
11.
Si fini, on a
-
12.
(Sommation par paquet) Si fini est une union disjointe finie (c’est à dire fini et si ) et alors:
En particulier, on a
-
13.
(interversion de sommes finies) Si sont finis et , alors:
En particulier, on a .
Démonstration :
1. Si , pour une bijection , on a donc par définition.
2. On pose une bijection et On note .
On a donc on a une bijection (en composant la soustraction de : avec la bijection donnée par la définition du cardinal , On pose si . Montrons que réalise une bijection de En effet, par hypothèse, est l’union des , dont tous les éléments sont atteints par , donc par qui est donc surjective. De plus, si , comme l’union décrivant est disjointe, on a et et comme est injective, on déduit et donc comme sont arbitraires, on déduit que est aussi injective.
Donc par définition de la somme sur un ensemble (au début et aux deux dernières lignes):
Le résultat sur le cardinal est une application du 1. et de la sommation par paquet pour la fonction constante:
3. Il suffit d’appliquer la sommation par paquet aux unions disjointes
Pour le cardinal on a par le 1 et la distributivité de la multiplication par rapport à l’addition:
□
2.2 Définition et premières propriétés
Définition 1.4.
Une famille de nombres réels positifs est dite sommable si
et alors on note
Tout d’abord, le résultat simple suivant ramène au cas dénombrable, ce que l’on supposera par la suite:
Lemme 1.12.
Si est une famille sommable, alors le support est au plus dénombrable.
Démonstration :
Si , alors . Sinon si et si , alors est au plus dénombrable comme union d’une suite d’ensembles finis car . En effet, si , donc si fini donc et donc □
On résume les propriétés générales dans l’énoncé suivant:
Proposition 1.13.
-
14.
(critère des suites exhaustives) Si est une suite exhaustive de parties finies de , alors la famille est sommable si et seulement si la suite est bornée et alors on a
-
15.
(lemme de domination) Si pour tout et sommable, alors est sommable et alors .
-
16.
(lemme de permutation) Si est sommable et est une bijection, alors est sommable de même somme.
Démonstration :
1/ La famille étant inclus dans la famille des sommes finies, il est clair qu’elle est majorée si la famille est sommable (et on a en passant au sup la partie de l’égalité énoncée). Mais réciproquement toute famille finie est inclus dans un certain , par définition d’une suite exhaustive, d’où la borne inverse et la réciproque.
2/ Il suffit de borner les sommes partielles finies et passer au sup.
3/ Pour tout fini, est fini donc D’où la sommabilité et la première inégalité en passant au sup. En considérant la bijection réciproque on obtient de même l’autre inégalité. □
Le dernier résultat généralise la commutativité des sommes.
Corollaire 1.14.
Une famille à termes positifs est sommable si et seulement si la série est convergente.
2.3 Sommation par paquet et applications
On conclut avec les deux résultats importants, le premier généralise l’associativité des sommes finies. On rappelle qu’une partition de est une famille d’ensembles 2 à 2 disjoints d’union égale à .
Théorème 1.15 (de sommation par paquets - Cas Positif).
Soit une partition de . Une famille est sommable si et seulement si on a à la fois les deux propriétés suivantes:
-
17.
pour chaque , est sommable, disons de somme
-
18.
et est sommable.
Dans tous les cas (même en l’absence de sommabilité), on a l’égalité:
Démonstration :
Commençons par la condition nécessaire. Si est sommable alors les sommes finies d’une sous famille sont bornées par les sommes de la famille totale donc on a la première condition de sommabilité et . Plus si on a des sous ensembles finis pour des distincts, ils sont disjoints et leur union est un sous-ensemble fini de donc
Donc en passant successivement au sup sur les fini, on obtient :
Donc la famille est sommable et on obtient la première inégalité en passant au sup.
Réciproquement, pour tout partie finie de on définit et on obtient un nombre fini de tel que . On déduit
D’où la bornitude sur qui donne la sommabilité, et l’autre inégalité en passant au sup. □
Un cas particulier est la “version famille sommable” du théorème de Fubini (qui se généralise à un théorème d’intégration). Le cas positif est nommé théorème de Fubini-Tonelli. Il correspond à la décomposition
Il donne un résultat d’interversion des sommes.
Théorème 1.16 (de Fubini-Tonelli).
Une famille double à termes positifs est sommable si et seulement si on a l’une des deux propriétés équivalentes suivantes:
-
19.
pour tout , est sommable et la famille des sommes est sommable
-
20.
pour tout , est sommable et la famille des sommes est sommable
Dans tous les cas (même en l’absence de sommabilité), on a l’égalité:
Démonstration :
C’est une application directe du résultat de sommation par paquets avec les partitions ci-dessus. □
Exemple 1.2.
Calculons la somme .
Comme c’est une série à coefficient positifs, chaque somme est somme d’une famille sommable, donc par Fubini-Tonelli, on obtient une somme sur le produit:
Comme chaque terme de la somme ne dépend que de , on a envie de considérer la partition de avec . Par le théorème de sommation par paquet, on a :
Il suffit donc de calculer Mais est fini de taille vu , donc C’est le terme d’une série de Riemann divergente, donc et les familles ne sont pas sommables.