4 Théorème d’injectivité de la transformée de Fourier
Définition E.1.
La fonction caractéristique (f.c. ou transformée de Fourier) du v.a. est définie par
pour tout et en notant le produit scalaire
La fonction caractérise la loi de par le théorème d’injectivité de la transformée de Fourier/ théorème d’inversion de la transformée de Fourier ci-dessous. On utilisera aussi plus tard au chapitre 2 la fonction caractéristique pour caractériser une notion de convergence, au chapitre 3 pour l’introduction des vecteurs gaussiens qui seront la base du chapitre 5 sur le mouvement brownien. C’est une notion FONDAMENTALE…
Lemme E.3.
Soit de loi normale alors
Démonstration :
On a vu une preuve à l’exercice 8 du TD 3 de MASS 31 utilisant que la partie imaginaire est nulle par parité et le calcul de la partie réelle en établissant une équation différentielle par intégration dépendant d’un paramètre.
On donne ici une autre preuve par prolongement analytique. Par transfert, on doit montrer en faisant le changement de variables on se ramène au cas
En prenant dans le calcul de la densité, on a pour
Pour , en appliquant le résultat précédent
La première bornitude permet d’appliquer le TCD pour les séries (ou Fubini pour la mesure discrète) et intervertir somme et série :
la fonction de droite est donc la somme d’une série entière pour , donc par identification des coefficients, elle vaut cette valeur pour tout , en particulier pour et on trouve le résultat. □
On démontrera le théorème suivant dans la prochaine section puisque la preuve utilise des propriétés générales de l’indépendance importante à noter pour elles-mêmes:
Théorème E.4 (Théorème d’injectivité de la transformation de Fourier).
Deux v.a. tels que
sont égales en loi, c’est à dire :
De plus, si alors a une densité par rapport à la mesure de Lebesgue donnée par (la transformée de Fourier inverse) qui est une fonction continue :
4.1 Sommes de variables aléatoires indépendantes (Rappels)
Vous avez probablement vu en TD de théorie de la mesure la définition de la convolution que l’on rappelle ici et relie aux sommes de variables aléatoires indépendantes.
Définition E.2 (Convolution).
Soit une mesure de Proba sur et une fonction mesurable telle que pour tout , est dans , la convolution de et est la fonction définie par :
Si est absolument continue par rapport à la mesure de Lebesgue de densité , on note aussi
Proposition E.5.
Soient des v.a. indépendantes :
-
6.
-
7.
Si sont dans
-
8.
Si alors est absolument continue par rapport à Lebesgue (sur ) de densité définie Lebesgue p.p.:
-
9.
Si seulement est de loi absolument continue mais de densité continue bornée , alors quel que soit est absolument continue par rapport à Lebesgue (sur ) de densité (définie partout). De plus, pour tout continue bornée :
Démonstration :
1. On a l’avant dernière égalité par indépendance car est bornée donc intégrable (par rapport à une probabilité).
2. En général par bilinéarité mais ici par indépendance les deux derniers termes sont nuls.
3.Il faut d’abord vérifier que est bien définie. Par Fubini-Tonelli vu le caractère positif :
donc existe et est fini p.p.
En prenant mesurable positive et en appliquant le transfert, on obtient par changement de variables dans l’intégrale sur obtenue par Fubini:
ce qui donne le calcul de densité (égalité de la loi avec seulement le cas ). Dans le cas de 4. on raisonne pareil sauf que continue bornée donne intégrable par rapport à la proba directement. L’application de Fubini vient de L’égalité intermédiaire donne aussi par transfert. □
4.2 Preuve [Facultative] du Thm d’injectivité de la transformée de Fourier
On va utiliser les lois gaussiennes pour se ramener au cas avec densité tout en exploitant leurs propriétés de stabilité par cette transformée.
Lemme E.6.
Soit la densité sur d’un -uplet de variable gaussienne i.i.d. Pour tout continue bornée, On a même convergence uniforme sur tout compact.
En terme de convergence en loi, cela signifiera au chapitre 2 que si sont les variables de densités , alors en loi en utilisant la proposition E.5.(4) au cas
Démonstration :
Par transfert et changement de variables
En prenant, en prenant le supremum sur un compact :
la limite vient de la convergence dominée par une constante puisque une constante est intégrable par rapport à une probabilité comme , et la limite ponctuelle en vient de la continuité de qui est donc uniformément continue sur et donc pour sont dans ce compact de distance tendant vers . Si est uniformément continue sur on a même convergence uniforme sur . □
On a aussi besoin de la conséquence suivante du lemme de classe monotone:
Proposition E.7.
Soient des variables aléatoires. Les propriétés suivantes sont équivalentes
-
10.
sont égales en loi :
-
11.
Pour tout continue bornée,
-
12.
Pour tout ouvert de ,
-
13.
pour tout :
La fonction appelée fonction de répartition caractérise donc la loi.
Démonstration :
Les produits d’intervalles et les ouverts sont des familles stables par intersection finie et engendrent la tribu des boréliens de (car par intersection et complémentaire on obtient les boules carrées de la norme infini et que tout ouvert de est union dénombrable de telles boules, de centre un point de par densité de .) On applique donc le lemme de classe monotone pour obtenir les 2 dernières équivalences. 1 implique 2 vient du th de transfert plus bas comme l’équivalence de 2 avec : Pour tout
Pour montrer 3 à partir de 2 et conclure, il suffit de remarquer que sont des fonctions continues bornées par (car la distance à un fermé est continue, cf. MASS 31). Si , et sinon, est une suite croissante qui tend vers (car si donc pour assez grand donc pour assez grand). Donc par convergence monotone, d’où l’égalité du 3. par celle du 2. □
Preuve du Thm E.4 :
Pour montrer l’injectivité, par le lemme E.7, il suffit de montrer que l’égalité des transformée de Fourier implique égalité de pour tout continue bornée.
Or par le lemme précédent, tout en étant borné par donc par TCD :
la dernière égalité avec de densité et indépendant de par la proposition E.5 (4) puisque la densité est continue bornée. Or la transformée de Fourier de est par la proposition E.5 (2) et donc
par le calcul du lemme E.3. Comme ceci est intégrable, on s’attend à avoir la formule d’inversion de Fourier de la deuxième partie qui va donner en fonction de , nous allons donc la montrer à la main dans ce cas pour conclure la preuve.
Or en interprétant la densité comme une variante de la transformée de Fourier dans le cas gaussien :
soit par le changement de variables de jacobien on obtient
soit en appliquant Fubini sur les intégrales en
qui est la formule souhaitée qui ne dépend bien que de la transformée de Fourier et conclut l’injectivité.
Maintenant si est intégrable est une domination (si est à support compacte) et puisque par les formules précédentes, on obtient par le TCD la formule souhaitée pour la densité à la limite. La continuité de la densité vient du Théorème de continuité des intégrales à paramètres. On remarque qu’en utilisant pour tout positive continue à support compact, on déduit positive (sinon par continuité elle est négative sur un ouvert dans lequel on peut prendre le support de pour contredire positivité de l’intégrale) et par convergence monotone et faisant tendre , on déduit intégrable et densité de proba. D’où on peut utiliser (maintenant valable pour continue bornée car peut servir de domination) pour identifier en utilisant le lemme E.7. □