2 Complément sur l’Espace dual (niveau début de M1)

Définition A.1.

L’espace E:=L(E,𝕂) des formes linéaires continues sur un e.v.n. E est munie de la norme duale

fE:=supxE,x1|f(x)|.

On a vu dans la section précédente que c’est toujours un espace de Banach. Il sera très utile dans ce cours pour étudier E lui-même.

Le résultat suivant, conséquence de Hahn-Banach permet de décrire réciproquement la norme de E en terme de celle de E (cela ressemble à la définition de fE mais c’est un théorème difficile ! que l’on exploitera pour relier E au dual du dual dans la section suivante):

Proposition A.1.

Soit (E,||.||E) un e.v.n., alors

xE=supfE,fE1|f(x)|=maxfE,fE1|f(x)|.
Démonstration : 

Par définition, on a

supfE,fE1|f(x)|supfE,fE1fExE=xE.

Inversement, on applique le Théorème de Hahn-Banach B.9 à G=x en posant g(tx)=txE de sorte que g(tx)||||tx||E. Donc, il existe fE tel que f(x)=g(x)=xE et f(y)yE c’est-à-dire fE1. En particulier, le sup est atteint en f et est donc un maximum.   □

On rappelle deux exemples d’espaces classiques.

Exemple A.1.

c0(I) est l’ensemble des suites (xi)iI qui tendent vers 0 dans le sens où si ϵ>0, il existe une partie F finie telle que |xi|ϵ pour tout iF. On munit c0(I) de la norme sup :

x=supiI|xi|<.

(I) est l’ensemble des suites bornée (xi)iI avec la même norme x.

Exemple A.2.

1(I) est l’ensemble des suites (xi)iI sommables, tel qu’il existe une constante C, tel que pour toute partie F finie telle que iF|xi|C. On munit 1(I) de la norme :

||x||1=supFiF|xi|=:iI|xi|<.

On étudiera la dualité des espaces Lp dans un chapitre ultérieur. Le résultat suivant donne un exemple de calcul de dual :

Proposition A.2.

Le dual de c0(I) est isométrique à

1(I)(c0(I)).
Démonstration : 

On définit T:1(I)(c0(I)) par :

T((ui))[(vi)]=iIuivi.

Bien sûr, on a l’inégalité montrant que T est bien défini et contractant :

|T((ui))[(vi)]|iI|ui||vi|||ciI|ui|.

Montrons que T est isométrique. Comme les suites à support fini sont denses dans 1(I) il suffit de montrer l’égalité dans ce cas, et cela vient en posant (vi)=1{vi0}vi¯|vi|c0(I) si (ui) à support fini de T((ui))(vi)=(ui)1. Donc comme (vi)c01 on a l’inégalité manquante :

T((ui))(c0)(ui)1.

Montrons que T est surjectif. Soit f(c0(I)) et ei la suite valant 1 en i et 0 ailleurs. Soit ui=f(ei), montrons que (ui)1(). Or par l’isométrie

(ui1iF)1T((ui1iF))(c0)=T((ui))vF(c0)=fvF(c0)f(c0)

car vF((xi))=(1iFxi) est une contraction sur c0 pour F fini (et par le calcul à support fini qui suit qui implique fvF=T((ui))vF). Donc pour tout F fini :

iF|ui|f(c0)

ce qui donne la sommabilité u1(I).

Montrons enfin que f=T((ui)).

En effet, si v est à support fini, f(v)=T((ui))(v) par linéarité mais comme les deux côtés sont continus en v et que (par définition) les suites à support fini sont denses dans c0(I), on obtient f=T((ui)).

Un autre résultat de base permet d’associer à une application continue u:EF une application (dite transposée ou adjoint) entre les duaux ut:FE.

Proposition A.3.

Si u:EF est une application linéaire continue ut(f)=fu définie une application linéaire continue ut:FE et on a

|ut|=|u|.
Démonstration : 

Par composition, si fF, u linéaire continue, fu est linéaire continue donc appartient à E. La linéarité en f est évidente. de plus ut(f)(x)fF|u|xE donc

ut(f)EfF|u|.

Ceci donne |ut||u|.

Réciproquement on utilise la proposition précédente pour obtenir :

||u(x)||F=supfF1|(ut(f)(x))|supfF1||(ut(f)||E||x||E|||ut|||||x||E.

Ceci donne par définition de la norme subordonnée, l’autre inégalité : |u||ut|.