8 Fonctions continues

8.1 Définitions équivalentes

On considère (X,dX=d) et (Y,dY=d) deux espaces métriques.

Définition 2.17.

Soient AX,Y des espaces métriques et f:AY.

  1. 25.

    Soit aA, f est dit continue en a si limxaf(x)=f(a), soit

    ϵ>0,δ>0,xAdX(x,a)<δdY(f(x),f(a))<ϵ.
  2. 26.

    f est continue sur A si f est continue en tout point de A. Autrement dit,

    aA,ϵ>0,δ>0,xAdX(x,a)<δdY(f(x),f(a))<ϵ.

Remarque: δ=δ(a,ϵ) dépend à la fois de ϵ et de a. Vous avez vu en L2, le résultat suivant.

Proposition 2.21 (Caractérisation séquentielle de la continuité).

Soit f:XY. L’application f est continue en xX si et seulement si pour toute suite (xn) d’éléments de X : si xn converge vers x, alors f(xn) converge vers f(x).

Démonstration : 

Supposons que f tend vers l=f(x) en x. Soit ϵ>0 il existe η>0 tel que f(B(x,η))B(l,ϵ). Vu que xna il existe N, tel que nN,d(xn,a)η donc nN,d(f(xn),l)ϵ. Ceci indique que f(xn)l.

Réciproquement, supposons par contraposition, qu’il existe ϵ>0 tel que pour tout η>0 f(B(x,η))B(l,ϵ)c∅︀. Donc, en prenant, η=1/n, on obtient xnB(x,1/n), tel que d(f(xn),l)ϵ. Pour tout n, donc xna et f(xn) ne converge pas vers l comme voulu.   □

Proposition 2.22 (Caractérisation topologique de la continuité).

Soit f:XY. Les assertions suivantes sont équivalentes :

  1. 27.

    f est continue sur X.

  2. 28.

    Pour tout ouvert O de Y, l’image inverse f1(O) est ouverte dans X.

  3. 29.

    Pour tout fermé F de Y, l’image inverse f1(F) est fermée dans X.

Démonstration : 

2.3. vient de (f1(B))c=(f1(Bc)) et de la relation fermés/ouverts.

1.2. Soit O un ouvert de Y et xO, il existe et on choisit ϵ(x)>0 tel que B(x,ϵ(x))O. Par continuité de f, soit yf1(O), f(y)=xO, il existe δ(y)>0 tel que f(B(y,δ(y)))B(x,ϵ(f(y)))O. Donc B(y,δ(y))f1(O) et comme y est arbitraire, f1(O) est ouvert.

2.1. Soit aA. Montrons que limxaf(x)=f(a). Soit ϵ>0. Par 1. V=f1(B(f(a),ϵ)) est un ouvert X. Or aV donc δ>0 tel que B(a,δ)V. En conséquence

f(B(a,δ))f(V)=f(f1(B(f(a),ϵ)))B(f(a),ϵ),

ce qui conclut.   □

Corollaire 2.23 (Stabilité par composition de la continuité).

Si f:XY et g:YZ sont continues, alors gf:XZ est continue.

Démonstration : 

Pour tout ouvert U de Z, g1(U) est ouvert de Y par coninuité de g, puis f1(g1(U)) est ouvert par coninuité de f, mais f1(g1(U))=(gf)1(U). Comme c’est vrai pour tout ouvert U, on déduit de nouveau du théorème précédent que gf est continue.   □

Exemple 2.14.
  1. 30.

    f:X définit par f(x)=d(x,z) est continue sur E car |d(x,z)d(x0,z)|d(x,x0) (inégalité triangulaire inverse).

  2. 31.

    Soit 0pn=r+s, p:Rns définie par si x=(y,z)n=r×s, p(x)=z. On munit n et s des normes ||.||1, on voit p(x)1x1, donc comme p est linéaire, p est continue car p(x)p(y)1=p(xy)1xy1.

Remarque 2.6.

Il résulte des théorèmes sur les limites que les opérations algébriques usuelles (somme, produit, composition) préservent la continuité. En particulier si P est une fonction polynomiale P:n c’est à dire de la forme P(x)=finieai1,,inx1i1xnin est continue comme somme et produits des projections (x1,,xn)xi.

Théorème 2.24 (de prolongement des identités).

Si f,g:(X,d)(Y,d) sont deux applications continues et DX est dense. Si f et g sont égales sur D, alors elles sont égales (sur tout X).

Démonstration : 

Soit xX, on sait par caractérisation séquentielle de l’adhérence qu’il existe anD avec anx. Par continuité de f,g en x, et caractérisation séquentielle de la continuité: f(an)f(x),g(an)g(x). Mais on sait que f(an)=g(an) par hypothèse, donc par unicité de la limite dans Y, f(x)=g(x). Comme x est arbitraire, on a f=g.   □

8.2 Homéomorphismes, Continuité uniforme, Lipschitzianité

Définition 2.18.

Une application f:XY est dite un homéomorphisme (ou une application bicontinue) si elle est bijective et si f:XY et f1:YX sont continues.

Définition 2.19.

Une application f:XY est uniformément continue si :

ϵ>0,δ>0:(x,x)X2,d(x,x)δd(f(x),f(y))ϵ.

Une application f:XY est K-lipschitzienne avec K[0,+[ si :

(x,y)X2,d(f(x),f(y))Kd(x,y).

Remarque: dans la continuité uniforme, δ=δ(ϵ) ne dépend PAS de x, contrairement au cas de la continuité.

Proposition 2.25.

Une application uniformément continue est continue.

Proposition 2.26.

Un application K-lipschitzienne est uniformément continue.

Démonstration : 

Pour ϵ>0 dans la définition il suffit de prendre δ=ϵ/K.   □

Exemple 2.15.

f:+ f(x)=x est uniformément continue mais pas lipschitzienne (cf TD.). Toute application uniformément continue est continue mais la réciproque est fausse : g: g(x)=x2 n’est pas uniformément continue sur (cf TD.).

xd(x,z) est 1-lipschitzienne X, (x,y)x+y est 2-lipschitzienne E×EE.

Le résultat suivant ne doit pas être confondu avec le Théorème 2.24qui ne donne que l’unicité d’un prolongement mais pas son existence.

Théorème 2.27 (de prolongement des applications uniformément continues).

Si f:(D,d)(Y,d) est une application uniformément continue, D(X,d) est dense et (Y,d) est complet. Alors f admet un unique prolongement continue g:(X,d)(Y,d) et celui-ci est uniformément continue.

Démonstration : 

L’unicité vient du Théorème 2.24.

Soit xX, et par densité xnD, xnx. Comme f est uniformément continue soit ϵ>0 et δ>0 tel que dX(x,y)<δdY(f(x),f(y)ϵ. Si on prend N tel que d(xn,xm)<δ, pour n,mN, on voit que dY(f(xn),f(xm))ϵ, donc comme ϵ est arbitraire, (f(xn)) est de Cauchy. Donc (f(xn)) converge vers zY par complétude.

Soit ynx une autre telle suite, alors d(f(yn),z)d(f(xn),f(yn))+d(f(xn),z)0, car d(f(xn),f(yn))ϵ dès que d(xn,yn)δet on voit donc que d(xn,yn)0 implique que d(f(xn),f(yn))0. Donc la limite z ne dépend pas de la suite choisie. On pose g(x)=z.

En particulier, g étend f (en considérant la suite constante). Soit zX avec d(x,z)<δ et znz alors pour n assez grand d(xn,zn)<δ donc dY(f(xn),f(zn)ϵ et on déduit en passant à la limite dY(g(x),g(z))ϵ. Donc g est uniformément continue (avec même constantes que f).   □

8.3 Fonctions continues bornées

Exemple 2.16.

Soit X un espace métrique, F un e.v.n. et Cb(X,F) l’ensemble des fonctions continues bornées sur X à valeur dans F, on a la norme uniforme (exo: vérifier que c’est bien une norme):

f=supxXf(x)F

Le résultat suivant a été vu en L2 pour F=.

Théorème 2.28.

Les espaces (Cb(X,F),||.||), pour X espace métrique et F espace de Banach est un espace de Banach.

Démonstration : 

On a vu que ce sont des espaces normés. Montrons qu’ils sont complets. Soit fn une suite de Cauchy, donc comme fp(x)fq(x)Ffpfq, pour tout xX, (fp(x)) est de Cauchy, donc par complétude de F, converge vers une valeur f(x). Soient p,q tels que pour tout x fp(x)fq(x)ϵ en prenant la limite q, on déduit fp(x)f(x)ϵ donc fpfϵ. Donc fp converge uniformément vers f, donc f est continue (résultat de L2 ou exo). De plus, fp est convergente, donc de Cauchy, donc bornée, disons par M. En passant à la limite dans l’inégalité fp(x)FM , on obtient f(x)FM et donc f est aussi bornée par M. Donc la limite f est continue bornée et fp converge vers f dans Cb(X,F). Ce qui donne la complétude.   □